M. Laurent BOUSSIN, Directeur de la SEMAG.
Le vieillissement de la population guadeloupéenne est enclenché depuis trois décennies.
A partir de 1965, la fécondité baisse, passant de 5,5 enfants par femme à 2,3 en 2004. Cette évolution a des effets divergents. Avec une population active qui va diminuer à partir de 2016, pour revenir en 2030 à son niveau de l’an 2000, le chômage devrait connaître une baisse massive. Mais la population aura fortement augmenté dans le même temps, passant de 400 à 500 000. Cela signifie que le nombre de personnes âgées va exploser. Et comme dans le même temps l’espérance de vie continue de croître, le troisième et le quatrième âge vont connaître une forte croissance, entraînant du même coup celle des personnes en situation de dépendance.
Pendant longtemps, les personnes âgées ont pu rester à leur domicile ou dans leur famille.
Les contraintes de la vie moderne, tout comme l’importance des besoins en la matière font que la question ne peut plus être traitée sans une intervention forte de la collectivité. C’est d’ailleurs la motivation du Président de la République lorsqu’il annonce la prise en compte de la dépendance en tant que cinquième risque à couvrir par le solidarité nationale à travers le système de protection sociale.
En matière de capacité d’accueil en établissement spécialisé, la Guadeloupe accuse un retard considérable qui appelle des initiatives fortes. Avec Laurent BOUSSIN, on s’intéressera ici à une présentation du dispositif juridique qui doit accompagner la politique de rattrapage indispensable en la matière.
Les EHPAD, établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes sont des établissements médico-sociaux au sens de l’Article L312-1 du code de l’action sociale et des familles modifié par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009.
Le texte cible « les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale. Du fait de ce statut ils sont soumis à un processus d’accréditation en vue de leur ouverture.
Ce processus d’accréditation a été entièrement revu par le Décret n° 2010-870 du 26 juillet 2010 relatif à la procédure d’appel à projet et d’autorisation mentionnée à l’article L. 313-1-1 du code de l’action sociale et des familles. Ce décret stipule que les créations d’EHPAD sont désormais sous l’autorité des agences régionales de la santé créée par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009.
UNE CRÉATION SOUMISE À AUTORISATION
L’autorisation est délivrée par le président du conseil général, lorsque les prestations qu’ils dispensent sont susceptibles d’être prises en charge par l’aide sociale départementale ou lorsque leurs interventions relèvent d’une compétence dévolue par la loi au département. C’est le directeur général de l’agence régionale de santé qui est compétent pour les établissements, services et pour les lieux de vie et d’accueil, lorsque les prestations qu’ils dispensent sont susceptibles d’être prises en charge par les organismes d’assurance maladie, ainsi que pour les établissements pour personnes âgées habilité à l’aide sociale.
L’autorisation est délivrée conjointement par le président du conseil général et le directeur général de l’agence régionale de santé pour les établissements et services qui remplissent les deux conditions précédentes. L’autorisation est délivrée à la suite d’un processus incluant une procédure d’appel à projet prévue par le décret n° 2010-870 du 26 juillet 2010.
Cette procédure est lancée d’après les indications du schéma gérontologique départemental et en entente avec l’ARS pour le PRIAC.
Le cahier des charges de l’appel à projet identifie les besoins sociaux et médico-sociaux à satisfaire, notamment en termes d’accueil et d’accompagnement des personnes, conformément aux schémas d’organisation sociale ou médico-sociale ainsi qu’au programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie lorsqu’il en relève. Un calendrier prévisionnel des appels à projet est arrêté par l’autorité ou, conjointement, par les autorités compétentes et publié au Bulletin officiel du ministère chargé de l’action sociale pour les projets relevant de la compétence du ministre ou au recueil des actes administratifs de chaque autorité compétente.
Ce calendrier, annuel ou pluriannuel, a un caractère indicatif. Il recense les besoins par catégorie d’établissements ou services sociaux ou médicosociaux pour la couverture desquels l’autorité ou, conjointement, les autorités compétentes envisagent de procéder à un appel à projet durant la période considérée. Il prévoit qu’au moins une des procédures d’appel à projet envisagées est réservée partiellement ou exclusivement aux projets innovants ou expérimentaux.
UN DUO DE DÉCIDEURS
La sélection des projets est encadrée par une commission ad hoc.
Il est institué, auprès de l’autorité ou des autorités compétentes pour délivrer l’autorisation, une commission de sélection d’appel à projet social ou médico-social. Elle comprend, à titre permanent, des membres ayant voix délibérative et des membres ayant voix consultative.
Ont voix délibérative, le président du conseil général ou son représentant et le directeur général de l’agence régionale de santé ou son représentant, coprésidents, deux représentants du département désignés par le président du conseil général et deux représentants de l’agence désignés par son directeur général. A ceux-là s’adjoignent six représentants d’usagers, dont trois représentants d’associations de retraités et de personnes âgées et trois représentants d’associations de personnes handicapées, désignés conjointement par le président du conseil général et le directeur général de l’agence régionale de santé sur proposition respectivement du comité départemental des retraités et personnes âgées et du conseil départemental consultatif des personnes handicapées.
En cas d’autorisation conjointe, une des autorités compétentes saisit l’autre autorité qui doit exprimer son accord dans un délai d’un mois. A défaut d’accord à l’expiration de ce délai, la procédure d’appel à projet ne peut pas être engagée.
La commission de sélection se prononce sur le classement des projets à la majorité des voix des membres ayant voix délibérative présents ou représentés.
Le président ou les coprésidents conjointement ont voix prépondérante en cas de partage égal des voix. Si les coprésidents ne parviennent pas à un accord pour exercer conjointement leur voix prépondérante, la commission ne procède à aucun classement des projets.
Les candidats ou leurs représentants sont entendus par la commission de sélection, sauf si leurs projets ont été refusés au préalable. Ils sont informés de leur audition quinze jours avant la réunion de la commission et invités à y présenter leur projet.
L’autorisation du projet par l’autorité ou, conjointement, par les autorités compétentes est délivrée dans un délai maximum de six mois à compter de la date limite de dépôt des projets mentionnée dans l’avis d’appel à projet. L’absence de notification d’une décision dans ce délai vaut rejet du projet.
La décision d’autorisation est publiée selon les mêmes modalités que l’avis d’appel à projet. Elle est notifiée au candidat retenu par lettre recommandée avec avis de réception. Elle est également notifiée aux autres candidats ; le délai de recours court à leur égard à compter de cette notification.
Lorsque l’autorité compétente ne suit pas l’avis de la commission, elle informe sans délai les membres de la commission de sélection des motifs de sa décision.
Cette nouvelle procédure d’accréditation a pour objet de fluidifier la création des établissements en l’articulant à la fois sur les besoins locaux et les capacités de financement des budgets soins (PRIAC) Elle améliore la concurrence entre les différents promoteurs par la publicité nationale des projets. Elle a aussi pour objet de favoriser la création d’établissements à coût sociaux.
EHPAD ET ESPIC
La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 créant les Agences Régionales de Santé distingue désormais
les EHPAD des ESPIC. Pour les établissements privés non lucratifs, la loi crée le statut d’établissement et service social et médico-social d’intérêt collectif (ESPIC). Ils doivent exercer leurs missions de manière non lucrative et désintéressée ou être habilités, par convention, à l’aide sociale.
Ils doivent répondre à de nouveaux besoins en matière d’accompagnement social et médicosocial,
ou à des besoins non satisfaits sur leur territoire.
Pour le reste il y a également en cours une réforme profonde du financement d’exploitation des
EHPAD et ESPIC fonctionnant en gros sur des dotations forfaitaires pour le soin et la dépendance.
Ces budgets sont affectés suivant des normes nationales et contrôlés après cout par un ERDP (état récapitulatif des dépenses et produits).
Pour un établissement habilité à l’aide sociale, l’exercice de gestion sera particulièrement pointu: tout dépassement des dotations soin ou dépendance devant être repris sur la partie hébergement, laquelle dans le cas de l’aide sociale est fixée par le département !
En définitive un EHPAD c’est en règle général environ 80 lits permanents dont plus de 50% sont dédiés aux maladies cognitives, 4 lits d’hébergement temporaire dont 2 dédiés à la maladie d’Alzheimer et le cas échéant, un accueil de jour (ou de nuit, ou d’urgence) en général de 8 à 12 places pour la maladie d’Alzheimer. Les EHPAD peuvent créer une structure dénommée pôle d’activités et de soins adaptés PASA, de 12 places fonctionnant pour les résidents Alzheimer hébergés en interne.