Nathalie Chevon,
chargée de mission Développement et Management du Pôle SYNERGILE.
Jean-Marc MOMPELAT, Vanessa WECK, Marcel DUBOUE,
membres du comité exécutif de Synergîle
Il y a 4 ans, à la faveur d’une stratégie nationale visant à soutenir l’innovation et fort du soutien du Conseil Régional de la Guadeloupe, le Pôle de compétitivité Synergîle était créé. Depuis, il relève un double défi : promouvoir l’innovation, source de compétitivité des entreprises à travers notamment des projets collaboratifs avec des laboratoires universitaires ; valoriser le savoir-faire des entreprises locales sur des secteurs porteurs et des filières industrielles internationales. Il s’agit de créer de la synergie dans nos îles, pour faciliter le développement de nouvelles activités, produits ou services innovants pour la création de richesse et d’emplois. *
Synergîle intervient sur deux secteurs clés de notre territoire : les énergies renouvelables et les matériaux et constructions adaptés aux milieux tropicaux soumis à risques.
Les pôles de compétitivité, fruits d’une politique industrielle nouvelle
En 2004, suite au lancement par l’Etat du premier appel à projets de pôles de compétitivité, 71 pôles ont été labellisés. Cette initiative a été proposée dans le cadre d’une nouvelle stratégie industrielle décidée par le Comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire (CIADT). Il s’agissait alors de mobiliser et de coaliser les facteurs clefs de la compétitivité, en particulier la capacité d’innovation des entreprises, dans un contexte d’économie mondiale de plus en plus concurrentielle.
Le concept de pôle de compétitivité repose sur un partenariat actif entre les industriels, les centres de recherche et les organismes de formation initiale et continue. Il est avéré, en analysant les modèles des clusters, que le rapprochement des acteurs industriels, scientifiques et de la formation d’un même territoire, constitue un catalyseur efficace sur les champs de l’innovation, de l’attractivité du territoire et du maintien ou de la création d’emplois ; et ce pour les raisons suivantes :
– la proximité stimule la circulation de l’information et des compétences et facilite ainsi la naissance de projets plus innovants,
– la concentration des acteurs sur un territoire peut offrir une visibilité internationale, constituant ainsi une source d’attractivité.
Une volonté forte affichée par les acteurs locaux pour l’émergence d’un pôle de compétitivité
Synergîle participe également à l’écosystème de l’innovation que vise à instaurer la Stratégie Régionale de l’Innovation de la Guadeloupe (SRI). Cette stratégie se décline autour de 4 axes :
- Consolider, développer et partager une vision et une culture commune de l’innovation ;
- Détecter, susciter et accompagner les projets innovants des entreprises ;
- Mieux orienter le dispositif d’enseignement supérieur et de recherche vers l’innovation ;
- Ouvrir à l’international le système régional d’innovation et renforcer l’attractivité.
A l’initiative du Conseil Régional, en 2007, les représentants d’entreprises, de centres de recherche et d’organismes de formation se sont réunis pour acter la création de l’association loi 1901, Synergîle, en réponse à l’appel à projets national “pôles de compétitivité”. Synergîle a été reconnu par l’Etat comme Pôle de compétitivité adossé à un pôle national en septembre 2007. Cette organisation particulière permet à Synergîle de bénéficier d’une mutualisation de moyens et de l’émulation d’une structure plus importante. C’est également le moyen d’en renforcer la visibilité. Synergîle a librement choisi de s’adosser à CAPENERGIES, basé à Cadarache (région Provence Alpes Côte d’Azur). Ce pôle intervient sur la thématique des énergies non génératrices de gaz à effet de serre. Il couvre aussi les territoires de la Corse et la Réunion, régions également concernées par les problématiques énergétiques des zones isolées, insulaires ou faiblement inter-connectées (concernant l’approvisionnement électrique).
Synergîle, un réseau de membres et partenaires oeuvrant dans les énergies renouvelables et les matériaux
Synergîle, pôle de compétitivité de la Guadeloupe, intervient dans deux secteurs-clés :
- les énergies renouvelables ;
- les matériaux et constructions.
Ces thèmes sont aussi couverts par d’autres pôles de compétitivité nationaux. Synergîle a l’ambition de les aborder sous l’angle particulier des territoires tropicaux insulaires soumis à des risques de toutes natures (sismiques et cycloniques).
Pionnière dans les années 80, la Guadeloupe s’est ouverte aux énergies renouvelables, pour atteindre jusqu’à 20 % de part d’énergie électrique produite par l’éolien, la géothermie, le photovoltaïque, l’hydraulique et la bagasse. Aujourd’hui, la Guadeloupe est la région française affichant le meilleur taux de diversification quant aux sources d’énergies renouvelables.
Par ailleurs, dans une perspective de développement durable, il est impératif d’inscrire la conception des équipements et constructions dans une optique pérenne. De ce fait, optimiser la durabilité des matériaux et constructions se présente comme une évidence dans nos régions tropicales soumises notamment à des risques sismiques et cycloniques, une forte humidité et un environnement salin.
Ces domaines, riches d’enjeux, invitent au développement de technologies et de services innovants. Or, la mise au point de ces derniers se heurte à divers obstacles : des défis techniques, des contraintes réglementaires et des exigences de viabilité économique. Les projets des membres de Synergîle entendent répondre à ces triples problématiques. Synergîle les appuie dans cette démarche.
De 40 membres en 2008 à 55 fin 2011, le nombre d’adhérents de Synergîle croît chaque année avec 3 familles d’acteurs représentées : entreprises, centres de recherche et organismes de formation. En 2010, les adhérents représentaient 2165 salariés pour un chiffre d’affaires total de 440 millions d’euros. Les entreprises et bureaux d’étude constituent les adhérents majoritaires. La chambre consulaire, des organismes financiers, des centres techniques et d’ingénierie et des fédérations professionnelles sont aussi adhérents du Pôle.
Parmi les centres de recherche, l’Université des Antilles et de la Guyane joue un rôle prépondérant aux côtés du B.R.G.M. et du C.I.R.AD.
Synergîle est un outil au service de l’innovation. Dans ce cadre, les entreprises et les organismes de recherche jouent un rôle déterminant au sein de la gouvernance du pôle. Parallèlement, ancré dans son territoire et afin d’être en cohérence avec les politiques de développement, Synergîle compte parmi ses membres les collectivités locales et les services de l’Etat.
Le budget de Synergîle pour l’animation du réseau et la gouvernance du pôle est en 2012 de 184 500 euros. Il est alimenté à hauteur de 30% par les cotisations des membres et la valorisation de leur temps passé au service du Pôle. La Région Guadeloupe et l’Etat alimentent aussi le budget par des aides représentant respectivement 30% et 40% du total. L’équipe permanente du pôle se compose de deux salariés. Pour assurer ses missions, il bénéficie en plus de la mise à disposition de personnels de certains membres notamment ceux participant aux instances de gouvernance. Ainsi, pas moins de 9 membres d’entreprises et 3 d’organismes publics contribuent à la déclinaison des actions et décisions prises par l’Assemblée générale de l’association.
Les missions de synergîle
- Animer la communauté de ses membres et développer son réseau ;
- Favoriser le renforcement de la coopération entre recherche, enseignement, industrie, organismes de financement et collectivités locales, en particulier au travers d’activités partagées entre les filières industrielles existantes ;
- Faciliter l’émergence de projets innovants répondant aux enjeux du territoire ;
- Conforter ou impulser sur le territoire des activités à fort contenu technologique ou de création ;
- Accompagner les porteurs de projets dans la concrétisation de leurs idées : expertise, recherche de partenaires, structuration de projets… puis les orienter vers les guichets adéquats en vue de trouver un financement ;
- Etre force de propositions pour les pouvoirs publics ;
- Acquérir et développer une visibilité à l’international pour les membres, leurs projets et savoir-faire.
Coopérer pour innover
Synergîle, par ses actions, favorise l’émergence de projets innovants collaboratifs entre des entreprises, des centres de recherche et des organismes de formation. Ces projets collaboratifs sont menés afin de générer un gain économique, que ce soit par le développement de nouveaux produits, par le dépôt de brevet. La finalité est de maintenir, voire de créer de nouveaux emplois. Les projets collaboratifs contribuent également à rapprocher organismes de recherche et entreprises. Ils facilitent une meilleure diffusion et appropriation des résultats de la recherche du monde académique vers le monde économique.
Afin de stimuler la naissance de ces projets partenariaux, Synergîle lance depuis deux ans, un appel à projets de recherche et développement collaboratifs. Parallèlement, des ateliers d’émergence de projets sont organisés.
Ils viennent compléter des projets qui sont régulièrement soumis à l’appréciation du pôle, hors appels à projets.
En 2011, 12 idées de projets ont été proposées à l’appel à projets. Parmi les 9 répondant au cahier des charges, 6 au final ont été accompagnés en vue d’obtenir un cofinancement. Pour sécuriser cette dynamique de projets collaboratifs, les porteurs de projets et leurs partenaires sont sensibilisés à la notion de propriété intellectuelle et ses implications et aux règles des accords de partenariat. Il faut souligner enfin que, pour des raisons évidentes, l’instruction des projets et l’appui que fournit Synergîle s’effectuent dans le strict respect des règles de confidentialité.
Depuis sa création, Synergîle a accompagné plus de 45 projets dont 18 sont passés en phase d’instruction financière. Ces projets sont principalement technologiques ou scientifiques. On peut citer par exemple : le projet REBECCA de recherche sur une canne-fibre combustible ; le projet ISOCFV concernant le développement de nouveaux matériaux isolants à base de fibres naturelles locales; le projet STENMAR visant à développer un prototype capable de convertir l’énergie de la houle côtière.
A l’échelon national, les pôles de compétitivité ont contribué à l’émergence de plus de 1000 projets collaboratifs.
Pour ces projets, il convient d’identifier un ou plusieurs partenaire(s). La construction d’un partenariat nécessite une confiance réciproque, le partage d’un vocabulaire et d’objectifs communs, la compréhension des contraintes de chacun, autant de paramètres qui exigent du temps souvent négligé par les partenaires.
Pour ces projets, il convient d’identifier un ou plusieurs partenaire(s). La construction d’un partenariat nécessite une confiance réciproque, le partage d’un vocabulaire et d’objectifs communs, la compréhension des contraintes de chacun, autant de paramètres qui exigent du temps souvent négligé par les partenaires.
marchés, la coopération permet de réduire les frais et les risques encourus lors du développement d’un projet innovant. Cette approche qui se diffuse encore timidement au sein du monde économique local porte le nom de coopétition, contraction des termes coopération et compétition.
Ainsi un partenariat fructueux, même entre entreprises concurrentes, repose sur la définition claire des domaines de partage de connaissances, de propriété des résultats et des retombées économiques. En combinant leurs efforts, les entreprises peuvent développer une technologie générique, réaliser un gain d’échelle et ainsi augmenter leur compétitivité. Elles développent ainsi un bénéfice commun en vue de faire mieux que les autres concurrents.
Ce partage des moyens et des risques contribue notablement à la compétitivité de filières économiques.
Ces appels à projets ont mis en lumière deux difficultés récurrentes pour le développement de projets collaboratifs :
- le financement des projets et la capacité d’autofinancement des entreprises ;
- la capacité propre de R&D limitée des entreprises locales.
En effet, la faiblesse de la capacité d’autofinancement des entreprises constitue l’un des freins majeurs au cofinancement de leurs projets et donc à leur concrétisation.
Notre tissu entrepreneurial est constitué majoritairement de petites unités aux capacités financières limitées. La mobilisation effective des financements publics est par conséquent difficile, du fait du principe de versement des subventions sur la base de dépenses réalisées. Lever des capitaux privés n’est pas plus facile dans la mesure où il s’agit souvent de projets démonstrateurs positionnés sur des technologies non matures et sur lesquels les investisseurs privés n’ont pas suffisamment de garantie.
Pour tenter de lever ces difficultés, les pôles de compétitivité ont mis en place des comités regroupant différents financiers et organismes financeurs. La commission des financeurs de Synergîle et le Club des financiers de Capénergies en sont des illustrations.
Les pôles ont également un rôle à jouer, en fournissant aux investisseurs des avis sur le couple technologie-marché ou sur le positionnement métiersfilières pour sécuriser et orienter leur choix. Des fonds de co-investissement sont en train de se mettre en place pour soutenir les projets dès la phase d’amorçage.
La disponibilité de ressources humaines compétentes et l’accès à des équipements technologiques en région sont aussi des facteurs clés à prendre en compte.
Afin d’inciter à la coopération université/entreprise, les régimes d’aide prévoient des bonifications pour les projets collaboratifs dans lesquels le partenaire Recherche a la possibilité de publier des résultats pour valoriser son expertise scientifique. Cependant, les équipes de recherche locales spécialisées sur les domaines du pôle, bien que très motivées, doivent en permanence veiller à l’équilibre entre leurs propres activités de recherche, leur enseignement et leur participation dans des projets d’entreprises. L’accès à des équipements technologiques est à ce jour insuffisant sur notre territoire. Il pourrait être renforcé via la mesure spécifique des investissements d’avenir pour soutenir les plates-formes mutualisées d’innovation. Celles-ci sont destinées à “offrir des ressources mutualisées (équipements, personnels et services associés) en accès ouvert, principalement aux membres de pôles de compétitivité et en particulier aux P.M.E”. Elles doivent permettre de mener à bien des projets de recherche et développement à fortes retombées économiques, pouvant aller jusqu’à leur phase d’industrialisation et de mise sur le marché. Elles ouvrent la possibilité de procéder à des projets d’innovation, des essais et des tests, de développer des prototypes et/ou des préséries, voire de servir de laboratoires d’usages ou « living labs ».
Cette mesure pourrait très bien accompagner le projet de création d’un technopôle souhaité par la ville de Baie-Mahault et le Conseil Régional. Cependant, une difficulté identifiée dans le développement de cette plate-forme réside en son modèle économique qui se doit d’être autonome au terme du versement des subventions apportées dans le cadre de ce dispositif. Il faut en effet trouver un mode de financement privé suffisant et pérenne pour garantir le fonctionnement de cette plate-forme (entretien, cofinancement de nouveaux équipements…), via des prestations et contributions diverses.
Quelle innovation encourager ? Technologique ou organisationnelle, quelle qu’elle soit, l’innovation doit correspondre à un changement notable dans l’entreprise et lui procurer un avantage concurrentiel.
Par exemple, la création ou l’adaptation d’un équipement, procédé ou technologie à nos exigences parasismiques ou para-cycloniques peut recéler un caractère innovant pour notre territoire. Cependant, celui-ci est insuffisant s’il ne permet pas ensuite à l’entreprise de se développer par la création d’un nouveau produit, procédé ou services exploitables commercialement à échelle locale, régionale voire internationale.
Aussi le pôle Synergîle veille, à travers un processus de labellisation, à accompagner et sélectionner les projets qui présentent des perspectives de viabilité économique avec des retombées évaluées initialement et mesurables avant et après le projet (développement de chiffre d’affaires, création d’entreprises, prise de brevet,…).
La labellisation “pôle de compétitivité” est accordée en dernier ressort par le pôle de compétitivité Capénergies auquel Synergîle est adossé. Elle repose aussi sur l’évaluation scientifique et technique des projets. Cette labellisation ouvre l’accès aux outils financiers spécifiques aux projets labellisés par les pôles de compétitivité. L’appel à projets du fonds unique interministériel (FUI) en constitue l’instrument majeur, ainsi que certains appels à projets du programme investissements d’avenir, tels que les instituts d’excellence pour les énergies décarbonées (I.E.E.D) ou les plateformes mutualisées d’innovation. La labellisation permet aussi de bénéficier d’un bonus financier. C’est notamment le cas des appels à projets de l’agence nationale de la recherche.
Genèse d’une innovation
S’engager dans un projet innovant présume d’un certain état d’esprit. Il convient d’être vigilant et pour cela de s’organiser une veille stratégique, technologique et économique, tant sur son coeur de métier que sur certains sujets connexes. Une telle attitude aiguille l’entreprise sur des activités à plus forte valeur ajoutée, des marchés émergents et des technologies encore latentes.
Innover nécessite aussi un bon sens de l’observation, de la curiosité et un esprit critique. Cela suppose une bonne connaissance de son secteur mais aussi d’avoir un oeil sur des secteurs transversaux.
Les partenariats interpoles de compétitivité visent à développer cette logique de conception à la jonction de différents secteurs, dite innovation par fertilisation croisée. Synergîle, à travers ces deux thèmes, offre un terrain propice au développement de telles innovations au carrefour des problématiques énergétiques et des matériaux durables. En outre, Synergîle prévoit pour cette année d’étendre sa coopération à d’autres pôles ou clusters, en particulier dans le domaine des matériaux afin d’offrir à ses membres d’amples opportunités de collaborations. Le pôle a également mis en place dès 2010, des petits-déjeuners thématiques et des journées scientifiques et techniques. Outre le mérite de faire se rencontrer et échanger les membres et partenaires, ces actions visent à fournir des éléments de veille scientifique et technique aux entreprises, centres de formation et acteurs des collectivités.
Un contexte difficile mais favorable pour les énergies renouvelables et les matériaux et constructions
Les énergies renouvelables, le bâtiment durable comme les écotechnologies sont des filières porteuses d’emploi et de croissance. Ces sujets bénéficient parmi d’autres d’une forte dynamique nationale et européenne avec l ‘émergence de nombreuses mesures de soutien. Cependant, notre éloignement géographique des centres décisionnels nationaux et européens font que ces initiatives sont souvent décidées sans concertation locale et qu’au final, les mesures incitatives ne sont pas adaptées à notre contexte. C’est ainsi que, suite à l’adoption des différents plans Grenelle, des appels à projets (A.D.E.M.E, ministère de l’écologie, union européenne) ou divers dispositifs de soutien financier ont vu le jour. Le constat a été fait par les membres du Pôle que ces actions étaient peu configurées pour nos entreprises (dossiers compliqués à monter, éléments économiques prospectifs à long terme demandés sur les marchés potentiels mais difficilement justifiables,…) ou nos centres de recherche (taille critique demandée dépassant les capacités locales).
Par ailleurs, la prise en compte de ces problématiques et la mise en oeuvre d’actions correctives demeurent encore peu abouties sur notre territoire.
Les énergies renouvelables peuvent participer durablement au mix énergétique de la Guadeloupe. Elles offrent la possibilité d’une décentralisation de la production d’énergie.
Toutefois, la démonstration reste à faire, tant sur le plan technologique (rendement, stockage, autoconsommation,…) que sur la validation de modèles économiques qui permettraient de soutenir l’investissement dans ces filières.
Les énergies renouvelables et alternatives offrent donc un potentiel important de valorisation de savoir-faire pour nos entreprises. La géothermie en est un exemple. En tant qu’unique centrale exploitant une ressource géothermique de haute température pour la production d’électricité, Géothermie Bouillante place la Guadeloupe dans une position de choix sur le plan international. C’est une filière identifiée comme stratégique par l’Etat.
La valorisation des savoir-faire de nos entreprises de ce secteur ne peut se faire qu’à la faveur d’un contexte réglementaire incitatif et d’un engagement stratégique volontaire à long terme des instances publiques décisionnelles.
On évoque souvent l’évolution des tarifs de rachat ayant affecté la filière photovoltaïque, mais l’énergie éolienne également s’est vue touchée par de nouvelles exigences réglementaires, facteur potentiel de blocage du développement de cette technologie sur notre territoire.
Le secteur du bâtiment doit répondre, lui aussi, aux défis environnementaux et économiques qui lui sont lancés. Outre la satisfaction des attentes des utilisateurs pour des locaux confortables, sains et économes en énergie, ce secteur se voit également soumis à des obligations de résultats pour respecter la règlementation thermique.
Pour gagner sur les coûts et la qualité, les acteurs devront évoluer vers une logique de travail en commun, de l’entrepreneur immobilier jusqu’à l’entreprise de démolition.
Les architectes et constructeurs locaux militent pour une reconnaissance nationale de leur expertise acquise du fait de nos spécificités géo-climatiques (constructions parasismiques et para cycloniques, habitat bioclimatique…).
De nombreux entrepreneurs fourmillent d’idées de projets de nouveaux produits constructifs. Très souvent, l’argument du manque de structure de certification locale est cité comme un des freins à l’aboutissement de ces projets.
En dépit de ces contraintes, les adhérents de Synergîle s’impliquent et sont force de propositions notamment sur les axes stratégiques suivants :
Le pôle a été impliqué dans ces sujets via différents comités de suivi. En 2011, Synergîle a participé notamment aux délibérations de l’Assemblée plénière sur l’habilitation à réglementer dans le domaine de l’énergie de la Région Guadeloupe ; ou encore au groupe de travail Energie dans le cadre de l’élaboration du S.R.C.A.E de la Martinique (Schéma Régional Climat, Air, Energie) ;
Les difficultés aux niveaux réglementaire, technologique ou infrastructurel ne doivent pas occulter le critère primordial sur lequel se focaliser, à savoir le marché.
Sur notre territoire confronté à un marché de relativement petite taille, l’ouverture à l’international est nécessaire. La promotion à l’export des savoirfaire et expertises des entreprises de Guadeloupe peut se faire aussi par le biais de l’internationalisation de notre recherche. Dans une approche de marché étendu, les projets de R&D peuvent être pensés plus ambitieux grâce à la perspective d’un retour sur investissement potentiellement plus grand.
Cela suppose de disposer d’une bonne vision stratégique de ces marchés et de leurs évolutions. L’identification des besoins des utilisateurs est un point essentiel de la démarche.
Sur ce volet, Synergîle travaille de concert et s’appuie sur les différents dispositifs mis en place par les structures d’aides à l’export : C.C.I, Ubi-France. Point particulier, cette année, les actions d’animation et de veille, citées précédemment, se voient étoffées par une expérimentation de veille stratégique et économique par le pôle au niveau caribéen et international.
Promouvoir l’anticipation des besoins en compétences
Sur le volet formation, différents projets ont été labellisés et sont soutenus par Synergîle.
Dans le domaine de la formation initiale comme le projet de diplômes d’ingénieurs de l’U.A.G dans les spécialités génie des systèmes énergétiques et matériaux, les adhérents ont été associés tout au long de l’élaboration du projet et plusieurs d’entre eux interviendront en tant que formateurs.
Dans le domaine de la formation continue, le pôle s’impliquera également cette année dans un Diplôme Universitaire (D.U) d’Architecture et bâtiment durable en milieu Caribéen et Amazonien proposé par le C.R.O.A.G (Conseil régional de l’ordre des architectes de Guadeloupe). Sur cette action, la mutualisation de ressources mobilisées pour une journée scientifique et technique sur le thème de l’efficacité énergétique est recherchée. Les architectes inscrits à ce DU profiteront d’une session de formation animée en présence d’experts scientifiques mais également des professionnels du domaine de l’énergie.
Sur ces deux domaines thématiques, Synergîle a vocation à contribuer à toutes les facettes de la formation professionnelle : évolution de l’offre de formation locale, expérimentation de nouveaux cursus, diagnostic de besoin de compétence, … En particulier, la réflexion est en cours sur la possibilité pour le pôle d’accompagner ses adhérents dans leur démarche de gestion prévisionnelle des ressources humaines et des compétences, dans un objectif d’élargissement de l’offre de service aux membres.
L’évaluation des pôles : quels indicateurs pour quels impacts
Les pôles de compétitivité sont évalués par des structures indépendantes tous les trois ans. Ces résultats servent ensuite à dessiner les contours de leur feuille de route pour les années suivantes.
Les résultats disponibles du précédent audit réalisé en 2008 indiquent5 “S’il est encore trop tôt pour évaluer l’impact du dispositif sur l’innovation et l’emploi, la plupart des pôles font preuve à ce jour d’un dynamisme prometteur. Ce dynamisme s’exprime notamment par le développement de coopérations entre acteurs jusqu’ici cloisonnés et la création de passerelles nouvelles entre universités, laboratoires et entreprises. En plusieurs occasions, la naissance du pôle a permis d’accélérer significativement la mise en place de projets structurants (infrastructures de recherche, campus…).”
L’évaluation des actions de Synergîle trouve écho dans cet audit. Les projets accompagnés par le pôle au cours de leur phase de montage associent en majorité entreprises et recherche.
Autres indicateurs : le nombre de projets labellisés ou les emplois sauvegardés ou créés. Il est encore trop tôt pour tirer un bilan sur ces indicateurs pour les projets labellisés Synergîle. Ceux qui ont en effet obtenu leur financement ont démarré depuis moins de 2 ans et leur stade d’avancement actuel ne permet pas encore de connaître l’impact de leur retombées techniques ou scientifiques ou en termes de création d’emplois.
Antoine Masson, coordonnateur des pôles de compétitivité au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche indique dans son rapport “repenser la politique des pôles de compétitivité” paru en décembre 2011, que l’expérience montre qu’il faut au moins 10 ans pour obtenir un réel avantage compétitif dans un cluster.
Cet avantage compétitif résulte de la conjonction de facteurs locaux que sont :
– les ressources (naturelles, humaines, capital, infrastructures) ;
– le marché ;
– les fournisseurs et les entreprises connexes ;
– l’environnement pour la stratégie, la structure et la concurrence des entreprises.
Des actions à poursuivre pour se renforcer et gagner en notoriété
Fédérer un ensemble d’acteurs autour de problématiques communes, conjuguer les compétences des centres de recherche et des entreprises dans le but de développer de nouveaux produits, catalyseurs du développement de notre territoire, telles sont les ambitions que se fixe le pôle Synergîle depuis sa création.
À la différence de nombreux territoires où une dynamique de réseaux existait déjà, le pôle Synergîle a émergé ex-nihilo, si ce n’est porté par la volonté de la Région, d’entreprises et de centres de recherche. Dans ces conditions, la stratégie initiale a été d’amener les acteurs à coopérer et à vouloir échanger.
À ce stade, le pôle prévoit de renforcer sa notoriété par une politique de valorisation de ses actions plus importante et par l’élargissement de ses missions. En particulier, il doit réfléchir à trouver une offre de services et une logique d’animation qui satisfassent à la fois les membres qui portent des projets et ceux qui n’en ont pas (encore !).
Jusqu’à présent, le volet Énergies renouvelables est le plus dynamique. La volonté est de trouver les moyens d’animer la thématique Matériaux et développer des projets sur ce domaine en lien avec les fédérations professionnelles oeuvrant sur ce thème (FRBTP, CAPEB,…).
Depuis sa mise en place, le processus d’accompagnement projet n’a cessé de s’améliorer notamment grâce à la synergie du réseau de partenaires publics (services de la Région, Etat) et au renforcement de l’ingénierie de financement de projets.
Le pôle souhaite maintenant contribuer à trouver des solutions pour la problématique des financements privés des projets et nouer des partenariats avec des organismes de financement privés. Les fonds d’investissement de proximité (F.I.P), les prêts participatifs à taux zéro sont autant de sources de financement potentielles vers lesquels les porteurs de projets pourraient être orientés.
Aborder la création de richesse et d’emplois sous un autre angle que le développement de projets innovants est une des orientations stratégiques vers laquelle Synergîle a choisi résolument de se tourner :
- renforcer son rôle de facilitateur de contacts pour contribuer à étoffer le réseau de ses membres ;
- contribuer à la structuration d’offres de service pour créateurs ou porteurs de projets ;
- continuer à développer l’innovation via la veille notamment puis via les projets ;
- renforcer sa présence dans les réseaux nationaux voire internationaux pour assurer la promotion de ses membres et trouver des opportunités d’affaire, sont quelques-unes des actions à l’aune desquelles pourront se juger les retombées du Pôle dans quelques années.
Principales actions de Synergîle en 2011
L’appui au développement de projets collaboratifs :
- Le lancement du premier appel à projets collaboratifs de R&D
- Accompagnement dans l’émergence des projets innovants et la recherche de financements.
- L’organisation d’un atelier thématique “certification des produits de constructions”, en partenariat avec le C.S.T.B (centre technique et scientifique du bâtiment) ;
- La tenue d’une journée scientifique et technique “Matériaux durables, matériaux innovants pour l’habitat” avec les interventions de chercheurs et d’entrepreneurs venus du Brésil, de Mayotte, de l’île de la Réunion notamment ;
- L’organisation et l’animation des groupes de concertation des acteurs du photovoltaïque sur les travaux de la commission Baroin, dans le but de faire remonter aux parlementaires de l’Outremer, des propositions communes aux Antilles, à la Guyane et à la Réunion sur les tarifs de rachat et le taux de pénétration de cette énergie solaire sur le réseau électrique ;
- La participation à la constitution du Cluster maritime Guadeloupe ; les ressources marines offrent des perspectives de production d’énergies renouvelables importantes selon la technologie employée et le potentiel disponible. Elles nécessitent d’être plus finement caractérisées et les technologies, étant principalement au stade de prototypes dans le monde, cherchent encore leur modèle économique. À travers la présentation de Synergîle, valorisation de l’image de la Guadeloupe à l’extérieur :
- Lors du séminaire d’échanges Eucarinet sur les énergies renouvelables Le projet Eucarinet vise à promouvoir la coopération internationale entre l’Europe et les Caraïbes, dans les domaines de la recherche, de l’innovation et du développement technologique.
- Au cours des Open-Days à Bruxelles sur le thème « Europe 2020; opportunités et défis pour les Régions Ultrapériphériques ». Synergîle apportait son témoignage en tant que projet exemplaire qui, par les financements de la politique régionale, montre la capacité novatrice de la Région Guadeloupe à améliorer /accroitre la culture d’entreprise, les qualifications de la main-d’oeuvre, l’offre des établissements d’enseignement et de formation, les services d’appui à l’innovation, les nouvelles sources de financement et le potentiel de créativité locale…
- Devant différentes instances de la Collectivité territoriale Corse, en tant que membre de la délégation Guadeloupe, accueillie en Corse dans le cadre du projet coopératif PURAVENIR. Ce projet, porté par la Région Guadeloupe, rassemble aussi les régions Réunion, Corse et Martinique. Il vise à mener une réflexion commune sur les choix spécifiques à faire en milieu insulaire concernant les ENR et la Maitrise de la demande en énergie, favoriser la mise en oeuvre de projets communs et procéder à un échange de bonnes pratiques (dispositifs d’outils financiers, gouvernance de la politique énergétique,…). Le soutien et l’accompagnement de membres au cours de missions internationales :
- Congrès Caribbean Renewable Energy Forum (C.R.E.F), à la Barbade, en partenariat avec l’Institut de Coopération Franco-Caraïbes (I.C.F.C)
- Mission de partenariat technologique dans le domaine des Smart-Grids (réseaux intelligents) à Boston et à Chicago, aux côtés des membres de 4 autres pôles de compétitivité.